Un mode de preuve soumis à des conditions
La surveillance du salarié doit respecter sa vie privée
La jurisprudence ne cesse de rappeler dans ses différents arrêts que la surveillance d'un salarié peut être illicite si elle ne respecte pas certaines obligations.
En vertu de l'article L.1221-1 du Code du travail, " Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ".
Concrètement, l'employeur doit justifier le recours à la surveillance des salariés par une raison objective par exemple la sécurité, les risques particuliers de vols dans l'entreprise, la preuve des transactions commerciales passées par téléphone, etc.
De plus, toute surveillance d'un salarié doit respecter sa vie privée, donc toute filature en dehors des heures de travail du salarié est interdite. Le principe du respect de la vie privée se fonde sur l'article 9 du Code Civil et l'article 8 de la CEDH.
La filature du salarié, un mode de preuve discuté
En droit social, la preuve est recevable uniquement si les moyens employés contre le salarié ont été portés à sa connaissance. Ces moyens doivent être proportionnés au regard de la finalité poursuivie, conformément à l'article L 121-7 du Code du travail. Cet article et repris par un arrêt de la Cour de Cassation du 23 novembre 2005 : " Attendu que si l'employeur a le droit de contrôler et de surveiller l'activité de son personnel durant le temps de travail, il ne peut mettre en œuvre un dispositif de contrôle qui n'a pas été porté préalablement à la connaissance des salariés ".
La jurisprudence de la Cour de cassation est constante : "Il résulte des articles 8 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, 9 du Code Civil, 9 du nouveau Code de Procédure Civile, et L. 120-2 du Code du Travail qu'une filature organisée par l'employeur pour surveiller l'activité d'un salarié constitue un moyen de preuve illicite dès lors qu'elle implique nécessairement une atteinte à la vie privée de ce dernier, insusceptible d'être justifiée, eu égard à son caractère disproportionné, par les intérêts légitimes de l'employeur."
De plus, le comité d'entreprise ou à défaut les délégués du personnel doivent être consultés avant toute installation d'un système permettant le contrôle de l'activité des salariés. Seront irrecevables pour justifier une sanction ou un licenciement les preuves recueillies contre un salarié par des moyens déloyaux ou dissimulés.
Cependant la portée de cette jurisprudence est atténuée par le revirement effectué par la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 6 décembre 2007, qui consacre le droit à la filature d'un salarié. En effet celle-ci ne la considère plus comme illégale, en l'espèce le rapport d'un enquêteur privé a servi à faire constater par huissier l'activité illégale d'un salarié en arrêt de travail, qui fut ensuite licencié pour faute grave. Toutefois, cet arrêt reste isolé.
Nos solutions pour assurer l'efficacité des moyens mis en place
Pour les particuliers, savoir respecter les conditions générales de recevabilité du mode de preuve.Pour les entreprises, vous diriger vers des solutions de rédaction de la clause d'information préalable.
- Effectuer des recherches afin de permettre un constat d'huissier à la demande de l'employeur. Dans ce cas de figure, le détective privé effectuera des vérifications préalables permettant le constat.
- Effectuer un constat d'huissier depuis le rapport du détective privé, sur la base d'une ordonnance sur requête (article 145 du code de procédure civile). Les délais sont plus longs mais les saisies et constatations d'un huissier intervenant à la suite d'une enquête sont exploitables en justice.
- Effectuer des surveillances et filatures relatées dans un rapport pour appuyer un dépôt de plainte. La preuve étant libre en matière pénale, le salarié pourra ensuite faire l'objet d'un licenciement pour faute grave si la procédure aboutit.